La Forêt aux merveilles
25 juin 2014Si vous connaissiez ma clairière ! Si vous y respiriez le parfum du cresson humide au soir tombant, si vous y rencontriez les ombres trompeuses qui dansent avec les premières et les dernières lumières, si vous y écoutiez battre le pouls distinct des arbres ! Ah ! Si seulement vous la connaissiez !
Cathédrale au milieu des bois, trouée sous les arcs-boutants de la dense canopée où s’agitent le jour des oiseaux piailleurs et glissent la nuit des rapaces malicieux, c’est le monde entier. Tout un peuple de bêtes formidables et puissantes, vives et colorées, somptueuses et discrètes.
On y trouve des cerfs, des paons, des renards, des lapins, des sangliers, des hiboux, des serpents, des écureuils, des perdrix, des faucons, des taupes, des loups, des chevreuils, des lièvres, des chauves-souris, des mulots, des chevêches bien sûr ! Et puis des insectes en quantité, des lierres somptueux, des champignons par milliers qui éclosent brusquement sur le pourtour des troncs.
Le feuillage est serré, dense, il jette partout son ombre découpée de grands rayons de lumière qui filtrent par endroit et dessinent par terre de grands lacs dorés scintillant sur la mousse et l’humus.
On se demande où logent tous ces bestiaux : y a-t-il vraiment dans ces bois tant de caches, de recoins, de terriers, d’abris, de nids, de grottes pour ce peuple agité ? Jamais l’activité ne cesse, quand les uns s’éveillent les autres se retirent et dorment, quand les premiers s’endorment les seconds rôdent les yeux grands ouverts dans les ténèbres impénétrables.
On entend toujours du chahut dans les branches, un fracas d’ailes ou un hululement lointain ; souvent les fourrés s’agitent et l’on voit surgir un écureuil ou un marcassin égaré. Un couinement sourd jaillit de temps à autres, auquel répond un jappement, un brame, un cri, un sifflement, un babillement, un chant.
Tout est merveille ici, tout est prétexte à l’enchantement.